dimanche 6 novembre 2016



L’OBSERVATOIRE ASTRONOMIQUE DE BEIJING





              Pendant deux siècles, les Lettres édifiantes et curieuses et les nombreux autres écrits des Jésuites constituèrent pour l’Europe entière la principale source d’information sur la Chine. Ces religieux devinrent, en effet,  les précieux auxiliaires de l’empereur. Le père Matteo Ricci (1552-1610) qui atteignit Beijing en 1601,  fut le premier à comprendre que les Européens ne pourraient se faire accepter des Chinois que s’ils se présentaient à eux comme leurs semblables en partageant avec eux une culture commune. Il apprit leur langue, étudia les classiques, le bagage de tout lettré et endossa le costume du mandarin. Il réussit ainsi  à fléchir la méfiance des Chinois, à se faire accepter et même respecter d’eux. On doit, notamment à ce père Jésuite, outre les bases d’un lexicographe et  d’un dictionnaire des plantes, une carte en forme de tulipe présentant l’Empire du Milieu… au centre et des travaux astronomiques. À sa suite, le père Adam Schall von Belle (1592-1666) fut nommé à la tête de l’Observatoire impérial de Beijing et devint l’un des précepteurs de Kangxi (1654-1722). Après lui, le père Ferdinand Verbiest (1623-1688) qui arriva en Chine en 1659 connut d’abord la prison. En 1664, les Jésuites furent en effet  condamnés à mort, pour avoir dénoncé les mauvais calculs des astronomes chinois, notamment à propos de la date des funérailles du fils de l'empereur. Une condamnation qui ne fut pas suivie grâce à un tremblement de terre et la connaissance d’une prochaine éclipse solaire !  Le jeune empereur Kangxi, impressionné,  invita le père Verbiest à un débat contradictoire sur les mérites de l’astronomie chinoise et européenne qu’il gagna haut la main contre Yang Guangxian (1597-1669) qui poursuivait les Jésuites de sa haine. Reconnu coupable de ne pas avoir produit un calendrier valide, ce devin chinois fut  condamné à l’exil, et en 1669,  le père jésuite fut  nommé président du bureau impérial des mathématiques. À ce poste, Ferdinand Verbiest détermina les principaux points géographiques de l’empire et dirigea les négociations qui fixèrent les frontières de la Chine et de la Russie au cours du traité de Nerchinsk de 1689. Il avait fait fabriquer en 1681, plus de quatre-cents canons. C’est à lui que l’on doit surtout  le remplacement et le perfectionnement des instruments en bronze de l’observatoire de Beijing qui avait été construit en 1442 sous la dynastie Ming (1368-1644) sur une terrasse carrée située sur le fortifications de Beijing. Ils comprennent une sphère armillaire, un quadrant, un théodolite, un sextant et un astrolabe. Ce n’est pas à notre honneur, les Français comme les Allemands s’emparèrent de ces objets en 1888, mais les rendirent à la Chine après la fin de la Première Guerre Mondiale.
              Ces instruments présentés à l’empereur Kangxi, le 6 mars 1674, ont été reproduits grâce à des gravures sur bois, dans un ouvrage en deux volumes (petit-in-folio – 395 x 199 mm) intitulé Ling-t’ai I-hsiang t’u que l’on peut traduire par « Collection d’instruments astronomiques nouvellement fabriqués ». Cet ouvrage qui comprend 106 doubles pages dont 105 illustrées, a été imprimé sur un papier fin de Chine blanc, recouvert d’un papier de soie jaune doré. Il s’agit, explique Stéphane Clavreuil qui le présentait à Maastricht lors de la dernière Tefaf, de la première édition imprimée par les Jésuites à Beijing, destinée au marché chinois, sans doute destiné à l’empereur et aux fonctionnaires de l’observatoire.
              Il existe une version européenne de cet ouvrage, le Liber organicus astronomia europae… (Dilingen, Johann Caspar Bencard, 1687  petit in-folio), précédé par  un discours en latin sur 9 feuillets gravés et imprimés comme en Chine. Un abrégé de ce même ouvrage en in-4°,  est paru chez le même éditeur  contenant les mêmes planches.

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